Olivier Piacentini
Mardi, Macron et Merkel ont proposé un plan de
relance de l’économie européenne. Un plan évalué à 500 milliards, et qui se
présente sur un format inédit. Il ne s’agit pas du Mécanisme européen de
stabilité, ni des fameux eurobonds, encore moins d’une extension du
quantitative easing de la BCE, récusé il y a peu par la Cour constitutionnelle
de Karlsruhe. La formule choisie est, en fait, un prêt global contracté par
l’Union européenne elle-même, destiné à être réparti entre les pays, suivant le
niveau de difficultés que chacun rencontre, et qui ne sera pas remboursé
directement par les États à due proportion des fonds alloués mais par l’Union
européenne. En clair, il s’agit donc d’une dette mutualisée, et qui se payera
très probablement par un impôt européen supplémentaire.
Pourquoi une telle formule ? D’abord, le soutien aux pays les
plus touchés doit se faire sans s’annoncer ainsi, vu l’opposition des pays du
Nord, Pays-Bas, Danemark, Finlande, mais aussi de l’opinion publique allemande.
Sans l’avouer clairement, le plan prévoit donc une répartition des aides
proportionnelle aux besoins de chacun, mais qui se soldera de façon égalitaire
par un impôt spécifique portant sur tous, donc relèverait d’une mutualisation
déguisée. C’est, du moins, ce que l’on peut déduire de l’exposé de
mardi, souvent peu explicite. Car toute la difficulté, pour les dirigeants, est
de faire avaler la pilule à tous ceux qui refusent les principes de solidarité
communautaire et de mutualisation des dettes, de slalomer entre les oppositions
qui s’élèvent depuis le début contre toute charge supplémentaire destinée à
soutenir les « partenaires » en difficulté. L’Europe démontre donc, s’il en
était encore besoin, que face à des crises majeures, c’est le réflexe
nationaliste qui reprend le dessus. Et l’arrêt récent de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe contre la
poursuite du quantitative easing en fut la démonstration la plus éclatante.
Or, l’Union européenne ne survivrait pas à un
nouveau cafouillage sur le volet de la relance économique. Déjà discréditée par
son inertie face à la pandémie, Bruxelles se trouverait totalement hors jeu si
elle ne parvenait pas à soutenir une économie européenne à l’agonie. Déjà,
l’Italie tout entière envisage sérieusement une sortie de l’euro, voire un
Italexit à brève échéance : la péninsule entière a manifesté avec éclat sa
défiance envers Bruxelles, sur les réseaux sociaux.
Entre le nord et le sud de l’Europe, parmi
lequel la France, surendettée et en grave récession, est désormais classée à
part entière, l’écart, déjà énorme, s’est creusé encore plus, durant ces deux
derniers mois. Coïncidence ou conséquence logique de la situation, ce sont les
pays les plus faibles qui se sont trouvés les plus atteints par la pandémie.
Comment l’euro pourrait-il survivre à ce fossé grandissant ? Comment maintenir,
dans une même monnaie unique, des économies qui n’ont plus rien en commun,
sinon que l’effondrement des unes entraînerait les autres dans leur chute ?
Mardi, Macron et Merkel ont surtout mené une
opération de communication destinée à sauver l’Union en danger de mort. Mais
c’est maintenant que la partie la plus dure commence, à savoir convaincre les
pays hostiles, et jusqu’à l’opinion et les plus hautes instances juridiques
allemandes.
L’Union européenne est
désormais un radeau de La Méduse, prêt à couler si les naufragés continuent à
s’écharper. Mais aussi, et surtout, si l’euro continue de favoriser
outrageusement les pays du Nord, Allemagne en tête. Sans une reconfiguration
radicale de l’édifice européen, ce ne sont pas les 500 milliards annoncés hier,
qui représentent moins de 3 % du PIB, quand la récession prévue atteindra au
moins le double, qui sauvera Bruxelles du naufrage.
Olivier Piacentini,
Ecrivain, politologue, Boulevard Voltaire, 20 mai 2020
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