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De gauche à droite, lors du
sommet européen du 9 décembre à Bruxelles : Jyrki Katainen (le premier ministre
finlandais), Nicolas Sarkozy, Angela Merkel et José Manuel Barroso. Photo: Eric
Feferberg/AFP
Arnaud Leparmentier
BRUXELLES ENVOYÉ SPÉCIAL - Le
pire est passé. Cet avis sur la crise de l'euro peut paraître téméraire, tant
les Européens sont allés de déconvenue en déconvenue, depuis le début de la
crise grecque à l'automne 2009. Pourtant, depuis dix jours, l'atmosphère a
changé.
L'apogée de la crise fut
atteint début novembre lorsque le premier ministre grec Georges Papandréou a
proposé un référendum sur le plan de renflouement de son pays. Et le énième
sommet de sauvetage de la monnaie unique, qui s'est achevé vendredi 9 décembre
à Bruxelles, pourrait être le bon. En dépit des agences de notation qui
menacent d'opérer des dégradations en cascade de toute la zone euro.
"BONNES FÊTES DE
NOËL"
Vendredi, en tout cas, les
dirigeants européens retrouvaient un brin de sérénité tandis que les marchés
financiers se redressaient. "Nous nous sommes souhaité de bonnes fêtes de
Noël", a expliqué Angela Merkel, espérant ne pas avoir à convoquer de
réunion d'urgence avant la fin de l'année. "La percée a été réussie",
a affirmé la chancelière allemande, assurant que "nous regagnons de la
crédibilité pas à pas".
Côté français, même le
secrétaire général de l'Elysée Xavier Musca, pessimiste invétéré depuis le mois
de juillet, avait perdu sa tête des mauvais jours. Les Français estiment qu'ils
ne pouvaient pas mieux faire avec les cartes en jeu.
Dès jeudi, à la réunion du
Parti populaire européen à Marseille, l'ancien président de la Banque centrale
européenne (BCE) Jean-Claude Trichet nous gratifiait d'un sourire. Un sourire
en "off", bien sûr, mais qui voulait tout dire : M. Sarkozy et Mme
Merkel ont enfin renversé l'accord perdant-perdant scellé au sommet de
Deauville un an plus tôt.
L'Allemagne avait alors exigé
de faire participer les banquiers privés au sauvetage de la Grèce, créant une
incertitude majeure sur l'engagement des peuples européens à rembourser leurs
dettes, tandis que la France avait évité des sanctions automatiques pour les
pays qui ne respecteraient pas l'orthodoxie budgétaire.
"Ce fut la plus grande
erreur de cette crise", commente un dirigeant bruxellois. Aujourd'hui,
Paris et Berlin ont décidé de durcir les règles budgétaires européennes et
jurent que jamais plus un Etat européen ne fera faillite. Ce revirement est au
coeur de l'accord franco-allemand confirmé vendredi par les Européens.
Mario Draghi, nouveau
président de la BCE, a qualifié les décisions prises de "résultat très bon
pour la zone euro". "C'est la paix des braves et la fin des
controverses institutionnelles", estime un proche de M. Sarkozy, qui
ajoute : "Nous avons achevé une renégociation à chaud du traité de
Maastricht", négocié il y a vingt ans jour pour jour, le 9 décembre 1991.
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LES GOUVERNEMENTS VEULENT
SAUVER L'EURO
Il a fallu que l'euro soit au
bord du gouffre pour que les Européens corrigent ses trois vices de
construction de Maastricht.
Le premier, c'est la
dérogation britannique, qui permettait à Londres de ne pas adopter l'euro mais
de continuer à freiner l'intégration de la zone. Vendredi, les Européens ont
bouté les Anglais hors d'Europe. A la surprise générale, le premier ministre
britannique David Cameron a été lâché par les pays de l'élargissement, à
commencer par la Pologne.
Le signal politique est majeur
: les gouvernements veulent sauver l'euro, y adhérer, et ont décidé d'aller de
l'avant. Sans attendre Londres, qui exigeait plus de libéralisme financier pour
la City. Et sans réformer les traités européens, pour éviter toute obstruction
britannique.
Second vice de Maastricht,
l'absence de gouvernement économique. Naguère, l'Allemagne s'y opposait,
voulant gérer seule son avantage compétitif. Elle a compris le risque qu'elle
encourait en partageant sa monnaie avec des économies en perdition. La rigueur
a commencé à être mise en oeuvre avec les plans italien, espagnol, voire
français.
Les sanctions prévues par le
pacte de stabilité, même quasi automatiques, ne seront peut-être pas opérantes,
mais les Européens sont censés discuter en amont de leur politique économique
pour éviter bulles immobilières et pertes de compétitivité qui firent le lit
des économies méditerranéennes.
LES EUROPÉENS SAVENT OÙ ILS
HABITENT
Troisième vice, l'absence de
mécanisme de sauvetage, promise aux Allemands mais sur laquelle il a bien fallu
revenir. Pour l'instant, la BCE joue les pompiers, alors que la récession
menace. Outre la baisse des taux, M. Draghi a fait un pas décisif, jeudi, en
annonçant un financement illimité sur trois ans des banques au taux réduit de 1
%.
Fortes d'une ressource bon
marché, les banques devraient être incitées à financer les entreprises et
acheter cet hiver les emprunts émis notamment par l'Italie et la France.
Certes, M. Draghi a déçu en n'achetant pas directement la dette émise par les
Etats et les entreprises, comme le fait la Fed, la réserve fédérale américaine.
"La mutation de la BCE
n'est pas achevée", explique un négociateur français, qui espère que la
banque agira si les circonstances l'exigent. Il existe un autre problème : le
fonds de sauvetage européen, dont la gestion a été confiée à la BCE, n'est pas
opérationnel et sa force de frappe reste trop faible.
L'Europe est donc encore très
vulnérable et les soubresauts sont jugés inéluctables. Mais après des mois de
débats, les Européens savent désormais à peu près où ils habitent. Une
condition indispensable pour rassurer les investisseurs, soucieux de savoir,
eux, où ils mettent les pieds.
Texte: Arnaud Leparmentier, Le Monde,
10-12-2011
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