Le Monde
Difficile d'imaginer pire
scénario pour l'UMP. Lorsqu'elle fut créée, il y a dix ans, l'ambition de
l'Union pour un mouvement populaire était claire : construire un grand parti
conservateur moderne, capable de fédérer toutes les sensibilités de la droite française
afin de résister à la concurrence de l'extrême droite et d'exercer durablement
le pouvoir.
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François Fillon et Jean-François Copé |
Six mois après l'échec de
Nicolas Sarkozy et au terme d'un duel sans merci entre Jean-François Copé et
François Fillon pour la présidence du mouvement, c'est très exactement à
l'inverse que l'on assiste : voilà l'UMP fracturée, sans chef légitime et
violemment partagée entre deux conceptions de l'opposition et de la droite pour
les années à venir.
Quelles que soient les
péripéties des heures ou des jours prochains, quelle que soit l'issue formelle
d'un scrutin dont chacun revendique la victoire, l'affrontement entre M. Copé
et M. Fillon aura été trop rude, trop vindicatif pour ne pas laisser de
profondes cicatrices. Le vainqueur désigné sera mal élu, objet de toutes les
suspicions, en butte à des rivalités exacerbées. Dans un parti où la
désignation du chef est le préalable à tout le reste, c'est un redoutable
handicap. Pour un rassemblement qui entendait surmonter les impitoyables
guerres des chefs d'autrefois, c'est un échec cinglant.
Cette crise de leadership se
double d'une évidente hésitation sur le rôle, l'attitude et la stratégie qui
doivent être ceux de l'UMP demain. En votant pour M. Copé, une moitié de ses
adhérents a plébiscité une "droite décomplexée", volontiers
protestataire et "sans tabou" à l'égard du Front national. En
soutenant M. Fillon, l'autre moitié a choisi une droite pugnace, certes, mais
"crédible et rassembleuse", capable de poser les bases des prochaines
alternances. Le match nul entre les deux hommes témoigne de l'impasse où se
retrouve leur parti.
Dans l'immédiat, cette situation calamiteuse réjouira, à n'en pas douter, tous les adversaires et concurrents de l'UMP. La gauche au pouvoir, qui connut il y a peu une situation comparable, peut escompter tirer quelque avantage momentané d'une opposition divisée, donc affaiblie. Le centre droit, qui tente de se regrouper derrière Jean-Louis Borloo, ne manquera pas de voir dans la crise de l'UMP la justification de sa stratégie et la démonstration que la France n'est pas mûre pour un parti unique de la droite. Enfin et surtout, le Front national peut espérer tirer quelques marrons du feu : son dessein explicite n'est-il pas de faire exploser la droite et d'en récupérer les soldats perdus, voire des bataillons entiers, frustrés et amers ?
Au bout du compte, c'est bien
le risque que la crise de l'UMP fait courir au pays : creuser un peu plus ses
fractures politiques et sociales, aiguiser les tensions provoquées par la
situation économique, nourrir le populisme et servir l'extrême droite.
Chacun, à gauche comme à
droite, doit en prendre la mesure. La démocratie française a besoin d'une
opposition solide et sérieuse. Pas d'un champ de ruines à droite.
Le Monde, 19-11-2012, 16h37
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