terça-feira, 10 de outubro de 2023

La civilisation totale – Ruines judéo-chrétiennes & matrices californiennes


Michel Onfray

Les civilisations naissent, croissent, vivent, connaissent un moment d’acmé, décroissent, chutent et disparaissent. Rien à voir avec une idéologie décliniste, un tropisme réactionnaire ou une lubie de pessimiste. Le réel témoigne avec des ruines que de grandes civilisations furent et sont aujourd’hui disparues.

Les peintures et gravures des grottes préhistoriques sont les sublimes reliefs d’une civilisation dont on ignore tout et qui sert souvent de support aux obsessions idéologiques d’une époque. De même avec les alignements mégalithiques celtes qui, de Carnac à Stonehenge, ou bien encore méditerranéens avec la Corse, Malte et la Sardaigne, sinon pacifiques avec les moaïs de l’île de Pâques, attestent d’une civilisation de la pierre levée dont on ne sait rien et ce, très probablement, pour toujours.

Personne ne remet en question le fait que ces civilisations ont eu lieu et ont disparu.

Pourquoi diable les autres civilisations, dont la nôtre, échapperaient-elles au destin de celles-ci ? D’autant qu’Assur, Sumer, Babylone, les Chaldéens et les Assyriens, les Indo-Européens et les Scythes, les Égyptiens des pyramides, les Grecs du Parthénon, les Romains du Colisée ont eux aussi disparu sans qu’on doute qu’une même dynamique civilisationnelle permette de penser cette dialectique des temps.

Mais les progressistes autoproclamés, dont leur essai de civilisation soviétique a échoué en soixante-quinze petites années, tiennent à leur schéma chrétien revisité par la Révolution française : péché originel de la propriété, attente du messie révolutionnaire à même de sauver le monde par sa venue concomitante avec l’établissement de son règne sur le principe de la parousie qui signerait la fin de l’histoire et la disparition de l’enfer de la propriété, ce qui permettrait, bonne nouvelle, épiphanie donc, de retrouver le paradis des biens communs du Jardin d’Éden. Ils tiennent à leur fiction et, pour ce faire, déclarent que le réel de l’Histoire n’a pas eu lieu, n’a pas lieu et n’aura jamais lieu. Ils préfèrent leurs rêves à la réalité.

Nous vivons à la charnière d’une civilisation qui s’effondre, la judéo-chrétienne, et d’une autre qui advient, l’occidentalo-californienne, ou la puritano-californienne. Les signes de l’effondrement ne manquent pas. J’en isole un seul auquel je recours régulièrement comme exemple : la cathédrale de la Sagrada Familia a été voulue par le génial architecte Antonio Gaudì au XIXe siècle. Elle commence en 1882 à Barcelone, c’est la date de naissance de Joyce et de Stravinsky, celle du décès de Darwin aussi, c’est également celle de la parution du Gai Savoir de Nietzsche et de la traduction en russe du Manifeste du parti communiste de Marx…

La totalité du XXe siècle ne suffit pas à sa construction. Pour mémoire, sous Guillaume le Conquérant, au XIe siècle, l’abbaye aux hommes et l’abbaye aux dames, le château avec son échiquier, et ce pour la seule ville de Caen en Normandie, voient le jour en une vingtaine d’années, ce qui atteste de la quantité, sinon de la qualité, de l’élan vital chrétien à ce siècle.

C’est au XXIe siècle que la Sagrada Familia est consacrée, bien que toujours en construction, par le pape Benoit XVI – pour être précis : le 7 novembre 2010. C’est seulement huit ans plus tard, en 2018, que la cathédrale obtient… son permis de construire – délivré l’année suivante, en 2019.

Le creusement d’une ligne de métro fait s’effondrer le Carmel en 2008. Le ministère de l’Aménagement du territoire du gouvernement espagnol projette le passage d’une ligne TGV Barcelone-Paris juste sous la façade principale de l’édifice.

Un attentat islamiste est déjoué en 2017, il visait l’édifice. Un commando de Daesh a eu le temps d’un autre attentat qui a fait quatorze morts et 120 blessés à Barcelone. Il devait être suivi par un carnage dans la cathédrale qui, de ruine anthume, est devenue un monument pour touristes visité par des millions de gens.

La Sagrada est inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco. C’est désormais un musée plus qu’un lieu pour la prière et le recueillement. Le pape qui a consacré l’édifice a démissionné en 2013 pour de prétendues raisons de santé – il est mort le 31 décembre 2022, âgé de quatre-vingt-quinze ans après presque une dizaine d’années de retraite… Un jésuite, le détail a son importance, l’a remplacé le 13 mars 2013.

La Sagrada Familia est une ruine avant même d’avoir vraiment et pleinement existé. C’est dire l’état du christianisme dans la vieille Europe ! L’élan vital chrétien ressemble au souffle court du vieillard au bord de la tombe. Il ne produit plus rien. En revanche, les charognards qui sentent l’animal malade commencent à donner des coups de griffes et de bec à la vieille religion judéo-chrétienne.

Des philosophes en vue exposent dans un journal progressiste, Libération pour ne pas le nommer, l’excellence de la zoophilie et de la coprophagie, les mêmes supports célèbrent l’achat et la vente d’enfants, ils souscrivent également à toute négativité qui travaille à l’affaiblissement de la bête judéo-chrétienne.

LA SAGRADA FAMILIA EST UNE RUINE AVANT MÊME D’AVOIR VRAIMENT ET PLEINEMENT EXISTÉ. C’EST DIRE L’ÉTAT DU CHRISTIANISME DANS LA VIEILLE EUROPE ! L’ÉLAN VITAL CHRÉTIEN RESSEMBLE AU SOUFFLE COURT DU VIEILLARD AU BORD DE LA TOMBE. IL NE PRODUIT PLUS RIEN.

L’avortement, valeur thanatophilique s’il en est, qui plus est dans une époque où la promotion de la contraception s’effectue dès le collège, devient un marqueur civilisationnel revendiqué par le président de la République d’une France vassalisée à l’Amérique wokiste et décolonialiste. Ce même chef de l’État devenu président de la Communauté européenne réitère : il veut que l’avortement figure dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Faut-il faire de ce droit un pilier ontologique de la nouvelle civilisation ?

Dans la logique de ceux qui travaillent à cette nouvelle civilisation, dont le chef de l’État français Emmanuel Macron, la réponse ne fait aucun doute : c’est oui. Car l’avortement, au-delà de ce qu’en a fait Simone Veil dans d’heureuses limites aujourd’hui explosées, dit que la marchandisation du monde doit s’étendre à tout, absolument tout, y compris le corps humain. Et pourquoi ne pas commencer par les plus faibles ? C’est-à-dire les enfants dans le ventre de leur mère avant de poursuivre avec « ceux qui ne sont rien », pour parler le langage macroniste, à savoir les vieux privés d’utilité sociale, voire, pire, qui coûtent au contribuable, selon la logique utilitariste de ces Nouveaux Barbares.

J’en veux pour preuve ce coup d’État ontologique qui a eu lieu dans la nuit du 31 juillet et du 1er août 2020 à l’Assemblée nationale avec un projet de loi concernant l’Interruption médicale de grossesse (IMG, à ne pas confondre avec l’IVG) qui prévoyait de rendre possible l’avortement pour « des raisons psychosociales », c’est-à-dire pour des motivations personnelles permettant d’invoquer les souffrances psychiques et sociales, afin d’en finir avec la vie d’un enfant jusqu’à neuf mois dans le ventre de sa mère.

Il n’est pas question de nier l’existence ou l’importance de ces souffrances, mais d’interroger le soubassement ontologique et idéologique de cette idée : avec cette néobarbarie, un enfant n’est pas un être autonome disposant de droits, un vivant doué d’une existence propre avec des parents qui le protègent, mais un projet de couple qui autorise les géniteurs à infliger la peine de mort à l’enfant qu’ils ne désireraient plus. « Je n’en veux plus, je m’en débarrasse » : c’est techniquement faisable, c’est donc moralement défendable, affirment ces nouveaux barbares. Ils réduisent l’être humain au statut d’un mouchoir jetable. Le docteur Mengele assure ainsi sa descendance – et il recrute à gauche2 – avec un Sartre embarqué !

Dans la grande logique de l’existentialisme sartrien, la nature n’existe pas, il n’y a que de la culture. Dans ses romans, mais également dans ses essais philosophiques, dont L’Être et le Néant, Sartre associe la femme au gluant, au visqueux, au glaireux, au coulant, au poisseux. La sexualité se réduit à un échange épidermique de sueur, de salive, de bave, de sperme, où la pénétration est par principe viol et n’est pas distinguée de sa dimension érotique et contractuelle. À quand une campagne des néoféministes pour lutter contre les lieux publics honorant le nom de Sartre, qui fut aussi très proche des occupants à Paris ? Par exemple en pistonnant Beauvoir à une radio collabo dans la capitale en… 1944.

Simone de Beauvoir, dite « la grande sartreuse », sous le conseil de son mâle dominant Sartre qu’elle sollicite pour une idée de livre, s’essaie à la méthode existentialiste sur le sujet du : « Que signifie être une femme quand on est femme ? » Ce qui donne Le Deuxième Sexe. Elle qui aime la nature, les balades, les randonnées, la marche, la montagne, les sorties vélo, ce que sa correspondance nous apprend, refoule cet amour de la nature qui ne va pas avec la haine que Sartre en a. Cette femme qui déclare le féminisme dépassé dès le premier paragraphe du Deuxième Sexe (3), devient sur un malentendu américain l’égérie de ce qu’elle a déclaré mort !

La philosophie française, y compris celle qui cherche à s’émanciper de Sartre, se trouve contaminée par cette religion artificialiste. Foucault, Deleuze, Guattari, Derrida écrivent obsédés par l’ombre de ce géant encombrant.

Le structuralisme est une machine de guerre qui aspire à en finir avec son autorité. La CIA ne s’y trompe pas, qui se réjouit de ces nouveaux penseurs français (4) désireux d’en finir avec un Sartre prosoviétique, marxiste-léniniste et révolutionnaire à l’ancienne ! Par son innocuité politique, le structuralisme permet au capitalisme de vaquer tranquillement à ses affaires. La French Theory sera bien évidemment soutenue par les universités américaines ! Elle nous revient aujourd’hui comme un boomerang. Le capitalisme s’en réjouit !

LE STRUCTURALISME EST UNE MACHINE DE GUERRE QUI ASPIRE À EN FINIR AVEC SON AUTORITÉ. LA CIA NE S’Y TROMPE PAS, QUI SE RÉJOUIT DE CES NOUVEAUX PENSEURS FRANÇAIS DÉSIREUX D’EN FINIR AVEC UN SARTRE PROSOVIÉTIQUE, MARXISTE-LÉNINISTE ET RÉVOLUTIONNAIRE À L’ANCIENNE!

La French Theory s’évertue donc à tuer Sartre mais elle ne s’affranchit pas de son culturalisme névrotique, de son artificialisme rabique, de sa haine pathologique de la nature, de sa réduction du réel à l’intellectuel. Des années plus tard, le sabir structuraliste, incompréhensible en français tant il est écrit par des adeptes du volapük sartrien dopés aux amphétamines et autres substances hallucinogènes, de l’aveu même de ces penseurs, traduit en anglais dans un charabia augmenté dont on imagine mal de quel délire il accouche, commenté dans des campus américains, engendre des clones qui défendent avec force rhétorique et sophistique langagière une série de sottises du genre : il n’y a pas naturellement d’hommes et de femmes, le sexe est une affaire de genre donc de choix et de volonté, le phallus et le vagin ne sont que des constructions langagières qui ne sauraient concerner le gynécologue car elles ne relèvent de la linguistique, de la sémiologie et de la sémiotique. Pas de sexuel, que du textuel. Lacan, qui a enseigné « il n’y a pas de rapports sexuels », devient l’oracle de cette maison de fous !

Il n’y a pas non plus d’hormones, ni de vagins, ni de pénis, c’est pourquoi, quand un homme veut effectuer une transition de genre il a recours… aux hormones et à la chirurgie plastique car, même une lecture intense, à fortes doses répétées, des philosophes de la French Theory, ne suffit pas à faire régresser des seins jusqu’à leur disparition ou à induire une prolifération du clitoris jusqu’à devenir un pénis en bonne et due forme. Il faut moins un philosophe qu’un pharmacien doublé d’un chirurgien.

Sartre & Beauvoir ont donc pensé en leur temps comme l’apprenti sorcier : ils ont rendu possible une Judith Butler aux États-Unis ou un Beatriz devenu Paul Preciado en France après travail du bistouri et de la pharmacie plus que de la méditation des séminaires de Lacan. Que le masculin ou le féminin ne soient pas naturels mais culturels, effets de volonté, projets donc volonté, voilà qui a touché les classes les moins intellectualisées de la société. Les lobbys LGBTQ+ s’évertuent désormais, avec la bénédiction des gouvernements maastrichiens de droite et de gauche, à porter cette bonne parole aux enfants des classes primaires. Il s’agit en effet de fabriquer un troupeau d’animaux transsexués comme on clone des brebis ou des vaches dans des laboratoires. Le paradigme religieux, sinon ontologique ou métaphysique, disons : anthropologique, se trouve remplacé par un paradigme vétérinaire.

Pourquoi dès lors s’étonner qu’on puisse ne plus vouloir d’un enfant dans le ventre de sa mère, puisqu’il ne saurait y avoir d’enfant naturel là où il n’y a qu’un projet culturel ? On hésite à tuer un enfant dans le ventre de sa mère avec une piqûre mortelle effectuée dans le cordon ombilical avant broyage de l’enfant sorti en purée de viande de l’utérus où il se trouve avec un aspirateur, ces déchets étant envoyés dans la poubelle avec les compresses tachées de sang, les pansements maculés de sanies, mais on ne recule pas devant une interruption médicale de grossesse sur un projet devenu caduque à cause d’un état dépressif, d’un malaise existentiel, d’une rupture du couple, d’une mutation professionnelle ou d’un chômage annoncé – d’une raison psychosociale qu’on pourrait dire sans trop extrapoler freudo-marxiste.

Et la civilisation dans tout ça ?

En la matière, il faut penser en termes de longue durée. Non pas 100 ou 200 ans, mais 1 000 ou 2 000. C’est la bonne mesure d’une civilisation.

On voit bien ce que ce projet d’IMG a à voir avec la civilisation à venir. Précisons en passant que la civilisation de demain est toujours préparée et produite par les barbares du jour qui deviennent des héros une fois que cette sauvagerie a généré une civilisation nouvelle. Il s’agit pour l’heure d’en finir avec le paradigme anthropologique construit sur l’évolution de l’homme des tribus primitives décrites par Darwin aux foules hébétées des mégapoles contemporaines. Cet homme est en passe de mourir. Les barbares travaillent à ce projet négateur et nihiliste.

LA CIVILISATION DE DEMAIN EST TOUJOURS PRÉPARÉE ET PRODUITE PAR LES BARBARES DU JOUR QUI DEVIENNENT DES HÉROS UNE FOIS QUE CETTE SAUVAGERIE A GÉNÉRÉ UNE CIVILISATION NOUVELLE.

On le sait, je l’ai souvent dit, le réchauffement climatique, sorti de sa petite exploitation politicienne, relève d’un destin astrophysique écrit : il nous enseigne que le soleil est mortel, lui aussi, et que son long chant du cygne annonce un trépas aux mesures de sa démesure, mais ce trépas documenté s’avère inévitable. D’où la nécessité de penser à une sortie de cette planète pour sauver des humains qui feront partie… du projet des dominants du moment, les oligarques des GAFAM.

De la même manière qu’un fœtus se trouve euthanasié quand il ne fait plus partie du projet des humains qui l’avaient voulu mais n’en veulent plus, quand il faudra se débarrasser des humains surnuméraires, une variation sur le thème civilisationnel de l’IMG permettra de passer à l’acte : piqûre létale, aspirateur de brisures de viande et évacuation des déchets humains avant incinération…

L’obsolescence de l’homme est programmée mais le grand philosophe Günther Anders, auquel on doit cette expression, n’avait probablement pas imaginé à quel point il avait raison.

Dans Le Meilleur des mondes, Huxley décrit « un totalitarisme courtois » qui ressemble à s’y méprendre à celui de notre époque : haine du monde d’avant, destruction du passé, séparation de la reproduction et de la sexualité, clonage industriel, production d’enfants à la chaîne, tri des embryons, eugénisme, vente et achat de bébés, banalisation des substances hallucinogènes, gouvernement par le conditionnement, la persuasion, la drogue, la chimie, destruction de la famille, sexualités nihilistes, commerce des corps, justification de la pédophilie, mépris des livres, vente d’organes, religion végane, recyclage des cadavres, industrialisation de l’alimentation, attaques de toutes les libertés.

Notre époque va même plus loin en ajoutant : la fabrication d’enfants dans des utérus artificiels pilotés par intelligence artificielle, c’est déjà le cas en Chine ; la préférence des moustiques aux fœtus humains, c’est le programme éthique des animalistes ; l’alimentation des populations avec de la viande cancéreuse, c’est le projet de la viande clonée au nom de l’évitement de la souffrance animale par ceux qui veulent industrialiser l’alimentation planétaire et en finir avec la paysannerie, autrement dit : dénaturer et artificialiser ici aussi ; le projet de confier la maternité à des mères cliniquement mortes, comme le souhaite une professeure de philosophie éthique anglo-saxonne ; l’euthanasie des fœtus porteurs d'un bec de lièvre, une pratique banalisée dans les hôpitaux français ; l’avortement transformé en marqueur civilisationnel, selon le catéchisme des « progressistes » français ; l’intoxication volontaire de la planète via des perturbateurs endocriniens avec la bénédiction des gouvernements de droite et de gauche…

Ce projet, dit progressiste, tient en un mot : réifier, c’est-à-dire transformer tout en chose, corps, cœur, âme, afin de pouvoir tout vendre, tout échanger, tout acheter dans l’immense marché planétaire d’un État total visant une civilisation totale : le rêve réalisé du capitalisme avec le concours d’une gauche devenue nihiliste !

Avant d’envisager les caravelles intergalactiques, ce qui ne manquera pas d’arriver, les civilisations diverses et multiples vont disparaitre. Les couleurs humaines se diluent dans un vaste métissage généralisé. Les pensées s’uniformisent grâce aux réseaux sociaux et, bientôt, comme un terrible accélérateur, grâce au puçage des cerveaux humains auxquels Elon Musk travaille actuellement – le gouvernement américain vient de lui en donner l’autorisation. Les épidémies ne manqueront pas d’arriver avec la fonte accélérée du permafrost, la généralisation des perturbateurs endocriniens, l’hypermédicalisation et la résistance aux antibiotiques et, quand elles seront mortelles à coup sûr, les derniers hommes retrouveront les instincts de leurs temps primitifs : le cannibalisme cohabitera avec l’embarquement dans les vaisseaux interplanétaires… L’inculture transformera l’homme surnuméraire en sauvage.

Les émeutes de juin 2023 ont montré de quoi des bandes débarrassées de surmoi sont capables. J’ai entendu, lors de reportages télévisés, des cris de bêtes et des danses sauvages autour des butins, des voitures incendiées, des biens dégradés, des magasins pillés. Je croyais mal entendre, j’entendais bien : des grognements comme j’en avais entendu un jour dans une forêt au Kenya il y a plus de trente ans, c’étaient ceux des singes ; cette fois-ci, c’étaient ceux de jeunes hommes…

Nous allons vers un État total, un État unique planétaire. Jacques Attali n’écrit pas par hasard un livre dont le titre est : Demain, qui gouvernera le monde ? La question de la gouvernance mondiale s’y trouve clairement posée. Les aspirants à cet empire sont déjà à la manœuvre, ils habitent sur la côte ouest des États-Unis et mettent au point une matrice californienne afin de répondre à ce défi qui, si l’on en croit Toynbee, est le moteur des civilisations.

Cet État total induira une civilisation totale, une civilisation cette fois-ci universelle. Le Divers cher au cœur du Victor Segalen des Immémoriaux aura disparu au profit d’une Monade totale, totalisante et totalitaire. Si l’on veut une idée de ce à quoi tout cela ressemblera, il faut lire 1984 d’Orwell et Le Meilleur des mondes d’Aldous Huxley (5). Il semble que ceux qui aspirent à cette gouvernance planétaire afin de travailler à la sortie, un jour, de cette planète, aient fait un bréviaire de la lecture de ces deux livres dits de science-fiction qui relèvent bien plutôt de la science politique – du jour et de l’avenir.

La mort m’aura pris depuis longtemps. Mais ce que j’en vois déjà ne m’inspire guère d’espoir. Je pressens des barbares à ce jour déjà présentés comme des héros et leurs victimes huées comme des salauds. L’inversion des valeurs se fera comme une inversion de pôles magnétiques, d’un seul coup, et elle sera totale. Notre planète sera redevenue la planète des singes. Des élus choisis par les patrons des GAFAM attendront le temps de quitter cette jungle pour vivre une vie où le virtuel prendra la place majeure.

L’odeur de la haie d’aubépines de Combray ne sera plus qu’une sollicitation neuronale dans une vie dématérialisée. Combray aura péri sous un soleil de fournaise. D’ailleurs, plus personne ne saura ce que voulait dire « Combray », de la même manière que plus personne ne sait aujourd’hui ce que signifie cet homme ithyphallique en érection à tête d’oiseau qui tombe, percé par une flèche, dans la grotte de Lascaux.

D’ici là : carpe diem.

Titre et Texte: Michel Onfray, Front Populaire, nº 14, septembre-octobre-november 2023

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