“Un Occident kidnappé ou la tragédie de l’Europe centrale”, l’article de Milan Kundera publié dans la revue de Pierre Nora, Le Débat, en novembre 1983, commence par ces mots: «En 1956, au mois de septembre, le directeur de l’agence de presse de Hongrie, quelques minutes avant que son bureau fût écrasé par l’artillerie, envoya par telex dans le monde entier un message désespéré sur l’offensive russe déclenchée le matin contre Budapest. La dépêche finit par ces mots: “Nous mourrons pour la Hongrie et pour l’Europe.”»
1956 est une date fatidiquedans l’histoire de la conscience européenne. Le soviétisme, cette grande esperance séculière qu’avait réactivée la victoire sur l’Allemagne nazie, entame alors son lent et inexorable déclin. Malgré les efforts déployés par la propagande pour dorer la pilule en célébrant l’aide fraternelle apportée par les troupes du pacte de Varsovie à la classe ouvrière hongroise afin qu’elle puisse triompher des sinistres forces réactionnaires, l’écrasement de l’insurrection passe mal. La rhétorique de la libération ne parvient pas à dissimuler la pratique ehontée de son contraire.
En juin 1957, Sartre publie un numéro spécial des Temps modernes sur la revolte de la Hongrie. Dégrisé de sa croyance en “l’extraordinaire intelligence objective du pari communiste”, il met fin à son compagnonnage par un long article intitulé “Le fantôme de Staline”.
Au même moment, Vercors,
grande figure de la Résistance et du progressisme, forge pour lui-même
l’expression “potiche d’honneur”: “J’ai joué ce rôle pendant plus de douze ans.
Mais arrive un jour où, tout ébrechée, toute fêlée, la potiche n’est plus
présentable.”
En août 1968, la répression du
printemps de Prague ouvre les yeux des fidèles les plus endurcis. Elle est, dit
Aragon, “la condamnation de nos illusions perpétuelles”. Et, dans sa préface
retentissante au premier roman de Kundera, La Plaisanterie, le Grand
Écrivain du Parti evoque un “Biafra de l’esprit’. L’Union soviétique trompe, le
soviétisme agonise.
Dans les années qui suivent,
les dissidentes de l’autre Europe achèvent le travail. Ils lèvent
définitivement le voile sur la réalité stalinienne et post-stalinienne.
L’imposture totalitaire éclate au grand Jour. Sartre et Aron, “les petits
camarades” de l’École normale que l’idée et la réalité communistes avaient
longtemps séparés, se serrent la main sous le Regard attendri d’André
Glucksmann.
À la même époque, le
journaliste Michel Cardoze écrit dans L’Humanité: «Certitude: Octobre
est LA Révolution. Celle qui a brisé la machine anthropologique du capitalisme
et jeté sur ses ruines les fondations d’un autre système où le producteur n’est
plus le valet de la farce: le socialisme. Celle qui a catapulté en haillons, et
la poitrine trouée de ses innombrables morts, la classe ouvrière au pied et à
la tête d’un État nouveau. Certitude: Octobre est LA Révolution. Celle qui va
sortir l’humanité des cavernes.»
Mais ce lyrisme détonne. Cette
grandiloquence tombe à plat. Cet enthousiasme ne fait plus mouche, il fait rire
et suscite l’incredulité. Comment a-t-on pu être aussi naïf?
En 1983, quand sort l’article
de Kundera, c’est le bilan globalement négarif de l’URSS qui desespere
Billancourt, et les intellectuels, dans leur immense majorité, n’opposent plus
les vertus du communisme aux tares du capitalisme, mais les bénéfices de la
démocratie imparfaite à la dévastation totalitaire.
Changement complet de vision
du monde, spectaculaire renversement des valeurs, mais à l’intérieur du même
dispositif. La pensée est bouleversée, le mode de pensée est intact: il demeure
politique, exclusivement politique.
Deux types de régimes se font face et la frase testamentaire – “Nous mouurons pou la Hongrie et pour l’Europe” – est d’autant moins audible, d’autant moins pensable à Berlin, à Rome et à Paris que le fantôme de Hitler y rôde encore.
Titre: Milan Kundera; Texte:
Alain Finkielkraut, in “Pêcheur de Perles”, pages 63, 64 et 65; Copie:
JP, 20-8-8-2024
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