segunda-feira, 17 de outubro de 2022

[L’édito de Valérie Toranian] Après le foulard, l’abaya et le qamis au cœur de la bataille islamiste à l’école


Valérie Toranian

Les hommages à Samuel Paty, décapité il y a deux ans par un islamiste pour avoir enseigné la laïcité dans son collège, se succèdent, aujourd’hui encore, dans les établissements scolaires de France. Il faut s’en réjouir et applaudir toutes les initiatives qui visent à faire comprendre le sens de la liberté d’expression et de la laïcité, deux fondamentaux républicains combattus, détournés et instrumentalisés par l’islam politique.

Commémoration ne veut pas dire adhésion. Pap Ndiaye, ministre de l’Éducation, a pu se confronter directement à cette résistance aux principes laïcs, lors de la visite qu’il a effectuée dans un lycée technique, le 14 octobre. Malgré les explications patientes du professeur, la classe de Terminale est sceptique. « En quoi ça dérange, les signes religieux ? » « Vous nous dites qu’on a le droit de critiquer une religion mais (contre cela) on a le droit de s’énerver aussi, non ? » « Plus vous allez continuer (avec la laïcité), plus il y aura des morts. » Ce n’est pas une discussion, c’est un dialogue de sourds. Une incompréhension profonde, voire un rejet, du discours transmis par l’enseignant.

« Après le foulard, l’abaya et le qamis sont les nouveaux chevaux de Troie de l’entrisme islamique à l’école. »

La question du port de l’abaya à l’école est survenue très vite dans la discussion avec le ministre. L’abaya est une longue robe ample féminine portée sur le reste des vêtements, elle est l’expression privilégiée de la « mode pudique islamique » et s’entend comme un prolongement du voile qui permet de masquer l’ensemble du corps. Le qamis est une tunique masculine arrivant au-dessus des chevilles, généralement portée par les hommes pour se rendre à la mosquée. Ces tenues sont traditionnelles dans les pays du Golfe et signes d’un islam rigoriste. Après le foulard, l’abaya et le qamis sont les nouveaux chevaux de Troie de l’entrisme islamique à l’école.

Sur les réseaux sociaux, on trouve les éléments de langage et les argumentaires précis pour faire passer ces vêtements religieux pour des vêtements culturels. Les influenceurs et militants islamistes savent exploiter nos failles et nos points faibles. Culturel ou religieux ? Comment savoir, comment juger, au nom de quoi ? La panoplie de l’offensive politique visant à déstabiliser l’institution scolaire est bien décrite dans la note du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR), datée du 27 août. Créer un nouveau front avec la question des abayas et des qamis pour déstabiliser les chefs d’établissement qui ont déjà fort à faire avec les refus d’enlever le voile ; provoquer des incidents relayés sur les réseaux sociaux ; demander des aménagements pour les heures de prière ; crier à l’injustice et à l’islamophobie. Il faut à la fois détourner la loi sur les signes religieux ostentatoires tout en la combattant.

Nous sommes exactement dans le même cas de figure que lors de l’affaire du foulard à Creil, en 1989, lorsque trois élèves avaient refusé d’ôter leur voile en classe : « Nous sommes des folles d’Allah et nous le porterons jusqu’à la mort ». L’affaire avait embrasé la France. La gauche « antiraciste » de SOS Racisme s’était déclarée solidaire des « mignonnes fillettes avec leur foulard », selon l’expression béate du président de la République, François Mitterrand. Lionel Jospin, ministre de l’Éducation, s’en était remis au Conseil d’État qui avait lâchement abandonné les enseignants à leur sort en leur donnant l’entière responsabilité d’exclure ou pas les élèves. Un Munich de l’Éducation selon le manifeste publié par Régis Debray, Élisabeth Badinter, Alain Finkielkraut, Catherine Kintzler et Élisabeth de Fontenay.

Il faut lire ou relire le prophétique ouvrage de Paul Yonnet Voyage au cœur du malaise français, publié en 1993 et réédité récemment par l’Artilleur, pour se remémorer les erreurs et le dévoiement d’une classe politique biberonnée à l’« antiracisme » racialiste : le discours dominant à gauche était la sublimation de la différence des cultures en opposition à l’assimilation républicaine, jugée oppressive et stigmatisante. On enterrait au passage la laïcité. « En aucun cas, une sanction ne peut être infligée à des élèves en vertu de leur foi », expliquait SOS Racisme. La religion au-dessus de la laïcité républicaine ? Ce discours du respect de la liberté et de la religion de l’autre a, depuis, largement contaminé la jeunesse, l’université, les médias. C’est exactement la bataille que mènent actuellement les officines islamistes à l’école.

« En septembre 2022 uniquement, 313 signalements d’atteinte à la laïcité ont été recensés, de la maternelle à la terminale, et plus de la moitié concernent le lycée. »

Pap Ndiaye dit avoir « évolué » sur la question des atteintes à la laïcité depuis son arrivée rue de Grenelle. « Il y a bel et bien une vague de port de tenues pouvant être considérées comme religieuses », a reconnu le ministre de l’Éducation. Qui pointe le rôle des réseaux sociaux, notamment TikTok et Twitter pour promouvoir les nouveaux emblèmes du combat politique islamiste. L’offensive est particulièrement dirigée sur les lycéens. En septembre 2022 uniquement, 313 signalements d’atteinte à la laïcité ont été recensés, de la maternelle à la terminale, et plus de la moitié concernent le lycée. Et comme le rappelle Iannis Roder, auteur de La Jeunesse française, l’école et la République (éditions de l’Observatoire), seule une partie des incidents remonte jusqu’au rectorat, beaucoup de chefs d’établissement préférant gérer les comportements inappropriés sans « faire de vagues ». Parmi ceux-là, combien restent fermes sur les signes religieux ostentatoires, combien baissent les bras par peur et s’accommodent ?

Le chef de l’établissement où Pap Ndiaye s’est rendu a demandé à la journaliste venue assister à la rencontre de ne pas citer le nom du lycée. La peur fait partie de l’ordinaire. Partout en France, des professeurs sont mutés, d’autres démissionnent. Dans les années 90, les intellectuels et les syndicats pro-foulards ricanaient sur les « affreux réactionnaires » et leur « obsession » raciste autour de ce « bout de chiffon » inoffensif. Aujourd’hui, d’autres refusent toute « police du vêtement » et veulent laisser les élèves s’habiller à leur guise. À leur décharge, entre-temps, un enseignant est mort décapité.

Les islamistes nous testent. Ils veulent démontrer que la loi de 2004 est inapplicable, absurde, liberticide. Ils veulent casser le consensus républicain qui demeure encore assez solide sur le sujet des signes religieux à l’école. C’est tout le paradoxe de ces journées d’hommage à Samuel Paty. D’un côté des commémorations qui semblent attester de l’hommage unanime de la nation à une victime de l’islamisme. Des célébrations qui rappellent les principes de laïcité et de liberté d’expression. De l’autre, des élèves, de plus en plus nombreux, totalement sourds à nos fondamentaux républicains et à nos mœurs. Et un entrisme islamique qui se déploie et détourne habilement la défense des libertés individuelles.

« Samuel Paty restera un symbole vivant si la République tient bon dans son combat contre l’offensive islamiste. »

Sans oublier, au milieu, quelques tartuffes comme les députés de la France insoumise qui n’hésitent pas à rendre hypocritement hommage à Samuel Paty tout en ne cessant de s’indigner contre l’islamophobie systémique de notre pays, soufflant ainsi sur les braises du ressentiment et donnant du grain à moudre aux islamistes.

Samuel Paty restera un symbole vivant si la République tient bon dans son combat contre l’offensive islamiste. La loi de 2004 sur l’interdiction des signes religieux concerne toutes les formes vestimentaires de la pratique rigoriste. Elle doit être appliquée sans que la main tremble. 

Titre et Texte: Valérie Toranian, Directrice de la Revue des Deux Mondes, 17 octobre 2022

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