Il n’aura pas fallu bien longtemps, après l’annonce d’un second tour opposant Marine Le Pen à Emmanuel Macron, pour qu’une partie du monde politique prenne position et donne ses consignes. Comme en 2017, sa priorité semble être de lutter face aux extrêmes. Mais, en cinq ans, les lignes ont bougé…
Michel Onfray
Emmanuel Macron et Marine Le Pen, qualifiés pour le second tour ce dimanche, avec respectivement 27,8 % et 23,1 % des suffrages exprimés, c’était attendu. Tout comme les réactions qui n’ont pas tardé à suivre. Si Marine Le Pen a su bénéficier tout au long de cette campagne de l’ombre d’un Éric Zemmour plus radical qu’elle — médiatiquement, tout du moins —, une fois privé de ce paravent, elle se retrouve à nouveau en première ligne. Comme en 2017, la candidate va devoir faire face à un « barrage républicain ».
Le front des candidats
déçus
Valérie Pécresse (LR), Anne
Hidalgo (PS), Yannick Jadot (EELV), grands perdants de ce scrutin, ont
immédiatement tenu à affirmer une position sans équivoque. « Ce soir, nous
prenons une fois de plus nos responsabilités, sans hésitation et sans ambiguïté
(…) J’appelle à faire barrage à l’extrême droite en déposant dans l’urne un
bulletin Emmanuel Macron le 24 avril prochain », a scandé le candidat
écologiste. « Je vous appelle avec gravité à voter contre l’extrême droite
de Marine Le Pen en vous servant du bulletin de vote Emmanuel Macron », a
déclaré plus tôt la maire de Paris. Quant à la candidate LR, elle a expliqué
voter « en conscience Emmanuel Macron pour empêcher l’arrivée au pouvoir de
Marine Le Pen et le chaos qui en résulterait ». Fabien Roussel (PCF) a
également exprimé une position similaire, expliquant qu’il ne « permettrait
jamais qu’un projet raciste et xénophobe soit mis en œuvre à la tête de l’État ».
Échouant à près de 300.000
voix du second tour, Jean-Luc Mélenchon (LFI) entend demander à ses militants
quelle position adopter lors du scrutin… tout en exigeant de ne « pas donner
une seule voix à Madame Le Pen ». Une position assez similaire du côté de
Philippe Poutou (NPA), pour qui « pas une voix ne doit aller à l’extrême
droite », sans aller jusqu’à appeler à voter Emmanuel Macron. Nathalie
Arthaud (LO) considère pour sa part que « les travailleurs n’ont pas à
cautionner par leur vote leur futur oppresseur ». Enfin, Jean Lassalle
(Résistons !) ne donne pas, pour l’heure, de consigne de vote : « puisque
vous avez été intelligents au point de nous choisir malgré tant de difficultés,
je vous fais totalement confiance pour faire votre choix ».
Autre perdant de l’élection, Éric Zemmour (Reconquête!) qui n’a réussi qu’à obtenir 7 % des suffrages, loin derrière la candidate RN, mais 3 points devant Valérie Pécresse. « J’ai bien des désaccords avec Marine Le Pen, je les ai abordés pendant cette campagne », a tout d’abord expliqué le candidat. Avant de préciser, « il y a face à Marine Le Pen un homme qui a fait entrer deux millions d’immigrés, un homme qui n’a pas dit un mot d’identité, de sécurité, d’immigration dans sa campagne ». En conséquence de quoi « je ne me tromperai pas d’adversaire, c’est la raison pour laquelle j’appelle mes électeurs à voter pour Marine Le Pen ». Une position similaire à celle de Nicolas Dupont-Aignan (Debout la France) qui demande de « tout faire pour éviter la disparition de la France avec Emmanuel Macron » et appelle donc à voter « Marine Le Pen »
Castors fatigués
Les différents états-majors
ont globalement suivi leurs dirigeants dans la soirée du dimanche et ce lundi
matin. Éric Coquerel (LFI) a repris les éléments de langage de Mélenchon et a
appelé à « ne pas donner une seule voix à Marine Le Pen », tout comme
Adrien Quatennens, qui considère « le vote pour l’extrême droite » comme
n’étant « pas une option ». Même son de cloche chez les écolos ;
Delphine Batho (EELV) appelle ainsi à « empêcher l’extrême droite d’accéder
aux responsabilités en France », tout en alertant : « Rien n’est joué et
le danger est réel ». Tout comme Julien Bayou, qui « réitère
l'appel à faire battre l'extrême droite ». Et commente : « C'est
la priorité même si ce n'est pas de gaîté de cœur que nous appelons à utiliser
le bulletin Macron ». Chez LR, Rachida Dati considère que ses différends
avec Emmanuel Macron « sont moins graves que de voir arriver au pouvoir »
le RN. À l’inverse, Gilbert Collard, Nicolas Bay, Stéphane Ravier, transfuges
du RN à Reconquête! pendant cette campagne présidentielle, déclarent vouloir
voter Marine Le Pen. Tout comme le porte-parole du parti d’Éric Zemmour, Guillaume
Peltier, qui explique « avoir 15 jours pour faire gagner Marine Le Pen ».
Pour autant, quelques voix
restent discordantes. Chez les Républicains, si aucun ténor du parti n’a pour
le moment appelé ou déclaré vouloir voter pour Marine Le Pen, les députés Éric
Ciotti et Julien Aubert ont expliqué ne pas envisager voter Emmanuel Macron au
second tour. À gauche, le maire (EELV) de Grenoble Éric Piolle, s’il avoue
qu’il votera pour l’ancien président de la République le 24 avril, alerte : « Depuis
que j’ai l’âge de voter, on nous fait construire des barrages contre l’extrême
droite. Ce soir je dis à Emmanuel Macron que les castors sont fatigués ».
Pour être efficace, un bon
barrage des castors a besoin d’un ciment : la peur. En 2017, Emmanuel Macron
avait multiplié les commémorations. Une manière bien commode, à l’époque, de
jouer la carte (bien pratique) de la reductio ad hitlerum contre
Marine Le Pen. S’il ne semble pas vouloir réitérer ces déplacements cette
année, il a toutefois déjà commencé à extrémiser son adversaire, dont il
qualifiait le programme de « raciste » dans une interview accordée
au Parisien le 7 avril. Une stratégie qui sera encore efficace
cinq ans plus tard ? Dimanche soir, un sondage Elabe pour BFM TV présentait le
président sortant vainqueur avec 52 % des opinions exprimées versus 48 % pour
son adversaire. L’écart se resserre ; autant dire que les castors ont du
boulot.
Titre et Texte: Michel Onfray,
Front
Populaire, 12-4-2022
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