domingo, 26 de setembro de 2021

Insécurité et immigration : les liaisons dangereuses

D’après toutes les enquêtes d’opinion, et ce depuis au moins 1945, les Français ont tendance à considérer que les immigrés commettent davantage d’actes délictueux que le reste de la population. Connu pour ne pas pratiquer la langue de bois, le criminologue Xavier Raufer nous aide à démêler le vrai du faux à ce sujet.


La population immigrée est-elle plus impliquée dans des actes délictueux que la moyenne des Français ?

D'abord, permettez-moi de noter que vous ne faites sans doute allusion ici qu’aux infractions de voie publique. Aucun des actes délictueux auxquels on pense quand on parle d’immigration ne concerne les autres domaines de l'illicite que sont par exemple les fraudes financières ou les atteintes à l'environnement. Ensuite, j’attire votre attention sur le fait que les immigrés sont, à l'origine du moins, pour la plupart d’entre eux des hommes jeunes venus « vendre leur force de travail ». On trouve rarement dans de telles aventures, forcément durables et pénibles, de vieilles dames ou des femmes enceintes. Or, la criminalité de voie publique est bien sûr principalement le fait d'hommes jeunes. Chez ces migrants économiques, à distinguer donc des familles qui fuient une guerre ou un cataclysme, les jeunes mâles sont surreprésentés par rapport à la population locale, dont la pyramide des âges, elle, est complète. Quelle que soit l'origine de ces migrants, la proportion de malfaiteurs potentiels en son sein est donc mathématiquementsupérieure à celle de la population autochtone comparable, comprise entre bébés et vieillards.

Voyez les Irlandais à New York : leur première génération se comporta de façon si agitée qu'aujourd'hui encore, la camionnette de police (« panier à salade » à Paris) y a toujours pour surnom argotique Paddy Wagon(en français : « fourgon des Irlandais »). Idem pour les juifs ou les Italiens dans la mafia new-yorkaise des années 1930, qui se sont assagis dès la deuxième génération. Le problème, en France, c’est que ça ne se calme pas, du fait d'incessantes vagues migratoires peu ou pas intégrées.

Enfin, je remarque que tout phénomène massif, mais incompréhensible à première vue, « s’explique » d'abord socialement en mode conspiratif. Du XVIIIe au XIXe siècle, l'économie villageoise devient nationale puis internationale ? Complots juifs ou francs-maçons ! Attentat du 11 Septembre ? Complot de la CIA ou du Mossad ! Et cetera.

Vos contempteurs vous accusent régulièrement d’être le père du concept d’ensauvagement. Est-ce le cas ?

Le sociologisme est à la sociologie ce que l'islamisme est à l'islam : dans les deux cas, d'ignares fanatiques maudissent leurs contradicteurs, faute de pouvoir convaincre. Évitant les termes emphatiques, j'ai parlé une seule fois d'ensauvagement dans la préface du superbe France, orange mécanique de Laurent Obertone (éd. Ring, 2013), qui fit exploser le réel criminel à la face de la bienséance médiatique. Or bien sûr, le terme avait déjà servi. Dès 1950, dans son Discours sur le colonialisme, Aimé Césaire dénonçait « l'ensauvagement de l'Europe » ; en 2005, la politologue Thérèse Delpech publiait L’Ensauvagement : le retour de la barbarie au XXIesiècle (éd. Grasset). Creusons plus profond. La décennie 1970 révèle la passion gauchiste pour ce « sauvage », cet « ensauvagement » sans cesse invoqué. En 1970, Bernard Kouchner signe avec Michel-Antoine Burnier La France sauvage sur les violences politico-sociales dans la France post-1968. À l'époque, Jean-Paul Sartre dirige chez Gallimard la collection La France sauvage, qui publie dix-sept ouvrages anars-maoïstes. Pauvres sociologues-gauchistes : ils ignorent même leur propre histoire.

Est-ce un invariant anthropologique que de considérer l’étranger comme un potentiel facteur de troubles au sein d’une société d’accueil ?

La xénophobie est un réflexe universel, que seule l'éducation réduit et corrige. Pour la France de 2021, que l'essentiel de la criminalité de voie publique soit le fait d'étrangers, ou d'individus d'origine « extra-européenne » aggrave plutôt les choses. Ce n'est pas moi qui le dis, mais le ministère de l'Intérieur. En 2020, deux rapports (police et gendarmerie) sur le crime organisé en France énumèrent tous les groupes criminels à l'œuvre chez nous : excepté les bandits corses de Marseille, sur 400 pages de texte environ, plus un Français d'origine dans les listes ! C'est si criant que ces deux rapports ont été mis en « diffusion restreinte », sans doute pour ne pas alarmer le bon peuple. Mais bien sûr, ces informations nous parviennent quand même…

LA FRANCE FUME 30 À 35 TONNES DE CANNABIS PAR MOIS ; SON SEUL TRAFIC RAPPORTE À TOUTE LA « PROFESSION » DE 1, 2 À 1, 4 MILLIARD D'EUROS PAR NA ET EST DOUBLÉ PAR UN TRAFIC DE COCAÏNE

Dès lors, peut-on dire que faire un lien entre insécurité et immigration est un fantasme d’extrême droite ?

De telles généralités ajoutent à la confusion. D'évidence, toutel'insécurité n'est pas à 100 % provoquée par toute l'immigration. Mais, sur les « territoires perdus de la République » règnent depuis deux générations, voire plus, des gangs à dominante ethnique issus de l'immigration, qui contrôlent des trafics relevant toujours plus du grand banditisme (trafic en gros de stupéfiants, racket, proxénétisme dit des cités, etc.). Fort enrichis en deux générations, ces criminels peuvent désormais corrompre bien des élus et fonctionnaires des deux rives de la Méditerranée. Un chiffre à ce sujet : la France fume 30 à 35 tonnes de cannabis par mois ; son seul trafic rapporte à toute la « profession » (l'essentiel aux caïds, bien sûr) de 1, 2 à 1, 4 milliard d'euros par an. Or, on observe de plus en plus que ces narcos doublent avec un trafic de cocaïne qui, depuis une décennie, arrive en Europe par la voie Afrique atlantique, Sahara, Maghreb, Sud européen. Certains gros narcos du Rif, au nord du Maroc, fréquentaient déjà Pablo Escobar vers 1980 et ont une longue pratique des trafics intercontinentaux entre l’Amérique latine, l’Afrique et l’Europe. Cela n'est pas un fantasme, mais une réalité dépeinte précisément et lucidement par les chefs marocains de la lutte antistupéfiants, entre autres.

Xavier Raufer

De quelles zones géographiques viennent les délinquants et criminels d’origine étrangère ?

Un tel entretien n'a pas vocation à l'encyclopédique. Braquons donc notre projecteur sur deux facteurs majeurs de la « criminalité de voie publique » qui, à présent, est celle qui exaspère le plus les Français.

Phénomène incontournable numéro un : la route des Balkans, de la Turquie jusqu'à l'orée de l'Union européenne. Récemment, un rapport d'Interpol estimait qu'environ 80 % des individus et biens illicites infiltrés sur notre continent (migrants clandestins, armes illégales, stupéfiants) remontaient de l'Orient vers les métropoles européennes en empruntant cet itinéraire. Tout au long de ce parcours, on trouve des clans nomades criminalisés qui notamment pillent les campagnes françaises, volent des gens faibles ou âgés dans les transports publics, etc. Encore une fois, tous ces nomades ne sont pas des criminels. Sur terre, nulle population n'est jamais totalement déviante. Même dans les épicentres mafieux, les criminels sont rares. La province de Palerme compte ainsi 1,3 million d'habitants et ses 59 familles mafieuses décomptées par la Direction des investigations antimafia regroupent à peine 3 000 membres initiés : c'est dire. Mais les nomades criminalisés sont hyperactifs et de plus, ont le sinistre usage de prostituer ou de réduire à l'esclavage leur propre famille, cousinage et voisinage.

Phénomène incontournable numéro deux : les mineurs non accompagnés (MNA), dont la bienséante nomination rappelle l'aphorisme de Georg Christoph Lichtenberg (obscur philosophe, disciple d'Emmanuel Kant) sur le « couteau sans lame dont on a ôté le manche ». Car ces MNA, Maghrébins pour les plus problématiques, ne sont ni mineurs ni isolés, mais bien plutôt des majeurs chassant en meute. Le gouvernement en compte « de 2 000 à 3 000 » criminalisés. Une sous-estimation flagrante : au minimum, ils sont 40 000 sur le sol national, privés de ressources, et vivant donc de quoi ? Mais tenons-nous à la moyenne de 2 500 de ces malfaiteurs MNA, dont chaque rapport officiel souligne l'hyperactivité délinquante. Considérons (petit minimum) qu'ils commettent deux infractions par semaine. Sur un an, cela en fait 260 000, qui seront largement impunies par une justice s'avouant elle-même « paralysée » par ce phénomène. Prenons maintenant la base plus réaliste de 10 000 MNA criminalisés en France métropolitaine, commettant chacun une infraction tous les deux jours : en un an, cela donne environ 1,8 million de délits ou crimes. Si le garde des Sceaux sortait un instant du registre de l'invective pour s'intéresser au réel criminel, puis daignait agir, il soulagerait une population française victime de ce pillage au long cours.

Faut-il distinguer délinquance étrangère et délinquance d’origine étrangère ?

La France est un État de droit, et les criminologues y ont pour seul guide le Code pénal. Nous ne définissons pas les « crimes » ou les « criminels » à notre fantaisie : tout cela est défini par les lois en vigueur, votées et instaurés par la représentation nationale. Si les statistiques aident bien sûr (surtout côté prévention), nos règles posent qu'un jugement ne saurait retenir les origines, la religion, la nationalité ou la couleur de peau d’un prévenu pour aggraver sa peine (sachant qu’il peut, mais le plus limitativement possible, en tenir compte pour éventuellement atténuer ladite peine). Voilà le cadre. Signalons cependant l'incohérence de la gauche bienséante et des antiracistes monochromes, qui vomissent la statistique ethnique dans le champ criminel, pour l'exiger absolument dès qu'il s'agit d'y rafler des avantages personnels sur une seule base raciale. Là encore, leur devise est « quand ça nous arrange ». Dans toute cette pitrerie, où est la loi ? Où est la justice ? Où est la logique ? On se le demande.

Peut-on expliquer la délinquance maghrébine ou africaine par le souvenir douloureux de la colonisation ?

De telles sornettes émanent d'une secte d'universitaires vautrés dans le post-maoïsme. Comme les bambins ont leurs doudous, ces agités ont à tout prix besoin d'un peuple-Christ-victime, sur lequel s'épancher. À moitié dames patronnesses, à moitié avant-garde délirante, ils s'enflamment désormais pour des ex-colonisés, des minorités sexuelles, etc. Leur truc est toujours le même : à la moindre interrogation ou contestation de leurs élucubrations, ils hurlent au complot nazi, à la volonté de rouvrir les camps de la mort. Rien de plus dangereux que des individus frustrés de leur dévorant désir de faire le bien : on sait ça (au minimum) depuis la Terreur. Ce tam-tam culpabilisateur à cent pour cent factice n'existe que grâce à des réseaux sociaux ou médias complices ou cyniques, désireux de faire le buzz et de multiplier les clics par cascades de scandales futiles. Ceci posé, venons-en à votre question : le colonialisme, fond de tableau de la violence sociale dans la France du XXIe siècle débutant ? Il se trouve que je fréquente de longue date des zones hors contrôle périurbaines et des lascars qui les hantent. Voici longtemps, j'ai réalisé, abasourdi au début, que pour ces « jeunes de banlieues », les criminologues étaient des sortes de collègues à qui il était sympa de parler, en mode footballeur d'un côté et supporter de l'autre. Je ne compte donc plus les fois où dans la rue, au bistrot ou en métro, j'ai été abordé par de tels jeunes. « On t'a vu dans telle émission… Wallah, c'est cool ton job… Dis, c'est vrai que t'as vu des mafieux ? » Dans tous ces cas bien sûr, j'ai accepté le dialogue avec joie. Même dans ma salle de gym du XIIIe arrondissement de Paris, j'ai, au fil des ans, passé des heures au hammam avec des « grands frères » de la banlieue sud venus lever de la fonte (le banditisme périurbain est un métier très physique…). Ce que j’ai constaté, c’est que le colonialisme, ils s'en tapent. Ceux avec qui je parle savent à peine l'histoire de leurs propres parents. Ce qui outrepasse le présent et le futur immédiat se noie pour eux dans un brouillard confus. Quand j'évoque mes cours et conférences en Algérie ou au Maroc, je les sens méfiants, réticents. Ce bled qu'ils disent adorer est au fond pour eux assez inquiétant. Ils savent que la DGSN algérienne (Direction générale de la sûreté nationale) et la gendarmerie du Maroc sont bien plus rugueuses que nos bons flics français. Comme ces lascars sont, hélas, quasi-illettrés, leur « patrie charnelle » est celle des séries vues à la télé. La lutte de libération nationale ? Bof… Les Crips et les Bloods de South Central Los Angeles, le gangsta rap : attention passionnée.

Quel risque représente l’espace de libre circulation de Schengen (auquel la France appartient) pour la sécurité ?

Qui dit Schengen dit Union européenne. En matière sécuritaire, l’Europe de Bruxelles est une pétaudière. Les grands États membres se cramponnent à leurs monopoles régaliens. Ainsi, quand on questionne la Commission sur le crime organisé ou le terrorisme, elle s'ingénie à passer la patate chaude aux États. Là-dessus, un kaléidoscope bureaucratique dévotement bienséant et se jetant sur toute ânerie politiquement correcte. Dans ce milieu, seuls accèdent aux sommets les bureaucrates les plus pâles et effacés – intégrale inversion des lois darwiniennes. Une décennie durant, je fus membre du groupe d'experts académiques d'Europol. Mes collègues (britanniques, allemands, etc.) et moi-même avons alors subi le « coordinateur de l'Union européenne pour le terrorisme », insipide politicard belge aux discours d'une si intersidérale vacuité qu'il était quasiment impossible d'en rien retenir. Au bout du compte, des instances pararégaliennes étriquées et inabouties : Frontex aux frontières, Europol pour l'illicite, Eurojust pour la justice, Olaf et l'antifraude, etc. Avec des outils à ce point sous-dimensionnés, envoyer Charles Michel et Ursula von der Leyen à Ankara face au matois Recep Tayyip Erdogan, était fort risqué. On n'a pas été déçus.

IMAGINONS QUE L’ON COMBATTE LES MALADIES VÉNÉRIENNES AVEC UM BUDGET AVEUGLÉMENT PARTAGÉ ENTRE LES BONNES SOEURS ET LES LIBERTINES, LE RÉSULTAT SERIAT UNE DÉPÉRDITION DES FORCES ET DE L’ARGENT GASPILLÉ. PAREIL POUR LES STATISTIQUES ETHNIQUES

Les statistiques ethniques sont interdites en France. Leur publication aurait-elle un intérêt ?

La criminologie s'intéresse d'abord à ce que font les malfaiteurs ; puis à ce qu'ils sont. Croire que l'un induit intégralement l'autre relève d'un déterminisme totalitaire, privant l'être humain de son libre arbitre. Notre domaine criminologique surplombe le droit pénal ; nous forgeons des concepts, étudions des phénomènes, ouvrons des perspectives. Ainsi, quand montait une vague terroriste en Europe et qu'elle s'amorçait en France même, je publiais au printemps 1982 un livre d'alerte intitulé Terrorisme, maintenant la France ? (éd. Garnier Frères). Depuis, j'ai conservé cette orientation : comprendre tôt, analyser, alerter, expliquer. Tout travail en amont de ce type débouche à terme sur des politiques, publiques surtout, parfois privées. C'est à ce niveau précurseur que des statistiques ethniques seraient utiles. En matière répressive, ces indications servent peu, mais préventivement, si ; pour savoir où et sur qui flécher la prévention, renforcer son effectivité. Imaginons que l'on combatte les maladies vénériennes avec un budget aveuglément partagé entre les bonnes sœurs et les libertines, le résultat serait une déperdition des forces et de l’argent gaspillé. Pareil pour les statistiques ethniques : préventivement utilisées, elles renforceraient l'efficacité des politiques publiques. Dans leur effet sur l'opinion, ces données fourniraient la mesure réelle des problèmes. On l'a vu jadis dans l'URSS : la censure ne fait qu'alimenter des fantasmes, dix fois plus affolants que le réel. Quand elle sait, une population a moins peur. Et quand la crainte recule, la xénophobie aussi. Mais bien sûr, nos antiracistes monochromes redoutent cela comme la peste : ils y perdraient leur fonds de commerce, leur racket des indulgences…

Propos recueillis par Maxime le Nagard, FRONT POPULAIRE, nº 6, Automne 2021

Xavier Raufer, Docteur en géopolitique et ancien chargé de cours l'université d'Assas Paris II (1986-2016), où il fut notamment directeur des études du diplôme de troisième cycle d'analyse des menaces criminelles contemporaines, il est expert en securité auprès de collectivités locales. Son dernier ouvrage: Le Crime mondialisé (éd. du Cerf, 2019)

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